14 août 2008
Vivre son rêve
Sans que je m'en sois rendue compte, je suis en train de faire ce que je voudrais faire dans ma vie: passer mes journées à dessiner, hors du temps, progresser dans la maitrise de cet art vieux de la préhistoire qui consiste à faire des traits sur une surface...
Avec ma tendinite, je ne peux certes pas dessiner autant que je voudrais, mais c'est mieux que rien, je peux faire un ou deux dessins, je m'arrête s'ils dépassent une heure parce qu'à ce moment-là j'aurais trop mal. Je regarde des DVD en même temps, parce que dessiner ne m'occupe pas tous les neurones, quand je m'arrête je lis des livres, et je cherche d'autres images qui pourront m'abreuver.
Je suis un alambic. Je perçois, je ressens et je retransmets avec ma main. L'image qui existe passe en moi et en ressort, interprêtée et soumise aux aléas d'un mauvais geste. C'est beaucoup plus puissant que de prendre une photo, ce qui fait deux alambics ou plutôt un alchimiste et son alambic. C'est moins personnel, à mes yeux.
J'ai la chance d'avoir la capacité de faire des dessins qui soient ressemblants. Certes, j'accuse souvent les traits, je vieillis de quinze ans, je creuse les rides, j'écrase les ombres, mais la forme est reconnaissable. J'ai le don du dessin. Et en plus, sauvage: je n'utilise pas de quadrillage, je pars d'une oreille pour faire tout un cheval et ça ne se voit pas trop car mon oeil corrige mes erreurs et déforme l'ensemble s'il le faut. Rares sont les gens à oser faire cette manière, de peur de se tromper. Ca m'arrive aussi, mais sur dix dessins, je n'en rate qu'un. C'est une bonne moyenne.
Je me sens à l'aise, à mon rythme un peu lent mais profond. Je vis à fond ce que je sais devoir finir. Je n'ai jamais osé répondre franchement à la question "qu'est-ce que tu veux faire plus tard?" parce que je ne crois pas la réponse réalisable: "artiste".
Artiste. Je ne le suis pas vraiment. Ou plutôt je suis une artiste du dimanche. Je n'ai pas de démarche précise pour mes dessins et encore moins une démarche qui fasse avancer l'histoire de l'art, je ne suis donc pas une Artiste. Ce n'est pas grave, ça me laisse la liberté de faire ce que j'aime. Et puis mes dessins sont rarement des gribouillis infâmes, ils me servent à me faire la main. Astérix me reproche que mes dessins ne soient qu'une jolie coquille vide. Je le trouve un peu cruel car mon fjord me semble directement sortir de ma page. Mais dans le fond il a raison, c'est le paddock avant le concours d'obstacle: la peinture.
Ah, la peinture... L'oeuvre par excellence. J'en ai commis deux et finie qu'une. Je ne suis pas peintre. Pas vraiment. Ca pourra s'arranger avec le temps, mais comme il me faudra faire mes 35 voire 40 heures, je n'aurais pas la possibilité de le faire. Plus le courage. Ecoeurée. Il faut être libre pour pouvoir s'adonner à l'art. Surtout libre dans sa tête.
Et puis artiste, ça veut aussi dire un atelier et... vendre. Je ne vends pas mes dessins. Et jamais je ne vendrais mes toiles déjà faites! Quand je dois donner un dessin, je le commence dans cette optique-là, sachant que je devrais m'en séparer. N'en riez pas, ça a posé un problème quand j'étais en cours parce que le prof nous avait demandé de mettre nos gribouillis en commun et aussi gribouillis soient-ils, j'ai refusé net en expliquant que ceux-là avaient été conçus finis et que je suis à leur disposition pour leur en faire d'autres qu'ils pourront utiliser. Moi qui essaye toujours d'être gentille voire effacée, je me suis montrée totalement inflexible, ce qui a choqué ces personnes. Et moi-même, mais du fond des tripes, c'était niet. Nada. Pas touche sinon je mords.
Ce sont mes petits, et ils le seront plus qu'aucun gamin ne peut l'être, car eux sont le fruit de mon cerveau, de ma main, de mes yeux, de mes fibres, chaque muscle qui détermine ma position d'aigle à l'affut. Et ils ont l'avantage d'être silencieux et immobiles, de m'appartenir corps et âme et de pouvoir être rangés dans un placard voir la poubelle s'ils sont vraiment ratés. Allez faire ça à un môme ou à un animal et vous aurez la DASS et la SPA au cul! Ils ne sont pas un poids, je les ai créés et j'en dispose sans qu'il ait une autonomie relative et pesante, non mais. Lol. Astérix n'a jamais compris ça, qu'on puisse préférer faire des dessins aux gamins. Mais il n'est pas dessinateur ni même écrivain et tout bouquin qu'il ait en tête, il ne l'a pas à serrer tendrement en se disant que c'est son oeuvre. A lui, rien qu'à lui, de sa tête et de sa main.
Le plus ironique dans l'histoire c'est que ça fait cinq ans que j'amasse des papiers pour me servir de modèles et que maintenant que j'en ai besoin, le classeur est à Paris.
PS: le dessin est de moi mais représente Denise Richards.
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